"La naissance de la tragédie" de Friedrich NIETZSCHE par Jean-François Mattéi le 26 novembre 2006


Le billet à CLAUDINE par Michel BOUDIN

NIETZSCHE ou la navigation sans boussole
Tu avais raison, trop savante cousine, Nietzsche n'est pas fait pour les têtes fragiles! A l'entrée de chacun de ses livres, on devrait pouvoir lire: "Nul n'entre ici s'il n'a le crâne assez dur pour résister à mon marteau philosophique."
Car il frappe très fort ce monsier Nietzsche. Mais il fascine aussi souvent qu'il assomme.
Nous avons, à DireLire, essayé de faire quatre pas dans "La Naissance de la Tragédie", mais sans le secours particulièrement éclairé du professeur Jean-François MATTEI nous nouss serions bien vite embourbés dans l'apollinien et le dyonisien.
Savais-tu, studieuse Claudine, que le souffle dyonisien est le seul mistral ontologique qui vaille et qu'il pousse devant lui nos destinées éparpillées? La terre, nous dit ce génial moustachu, n'est pas le désert où l'homme est en exil, mais doit être le lieu de son séjour heureux. Même si ce monde n'est qu'une explosion de forces désordonnées, sans destination, sans principes et sans fin en soi. Un monde sans boussole en somme.
Mais alors qu'avons-nous à faire dans cette galère qui fuit par toutes ses plaches et n'a pas d'astrolabe? Il reste à l'aimer, nous dit Nietzsche, car de toutes façons elle va éternellement revenir. Et puis rien ne nous empêche d'inventer des caravelles (ou de s'inventer soi-même, me souffle Montaigne, en remontant sur son cheval).
Pour notre quart d'heure de détente, pudique Claudine, nous parlâmes de trous sans bord et d'utérus vainqueurs d'improbables entropies.
Tu vois comme ce philosophe est contagieux. Pour un peu il ferait divaguer ton pourtant très cartésien cousin.
FLORENTIN

Un vrai bonheur cette rencontre animée par Hervé CASINI, passionné d'opéra, avec le philosophe Jean-François MATTEI autour de "La naissance de la tragédie à partir de l'esprit de la musique", titre complet de l'oeuvre.
En supplément: Ainsi parlait Friedrich NIETZSCHE
1. A quinze ans (1860) "Encore le cafard"
2. A dix-neuf ans (1864) "Vas-tu rire enfin"
3. A vingt ans "La plume à la main, je contemple longtemps le papier blanc qui est devant moi...Avouons-le. J'écris sur les humeurs parce que je suis d'humeur à le faire, et c'est une chance que je sois justement d'humeur à écrire sur les humeurs. "
4. A vingt-six ans dans la naissance de la tragédie. "Que nous indique le mystère de cette unité entre la musique allemande et la philosophie allemande si ce n'est une forme d'existence nouvelle... En même temps, nous sommes animés du sentiment que , pour l'esprit allemand, la naissance d'un âge tragique n'est qu'un retour à lui-même... A présent enfin, revenu aux sources de son être, il peut se présenter devant tous les peuples, hardi et libre, et débarrassé de la tutelle de la civilisation latine...
Aujourd'hui nous vivons la renaissance de la tragédie et sommes en danger de ne pas savoir d'où elle vient, de ne pas pouvoir nous expliquer où elle va. "
5. A quarante et un an (1886) "Essai d'autocritique sur la naissance de la tragédie"
"C'est pour moi un livre impossible... Je le trouve mal écrit, lourd, pénible... Mais il y a bien pire dans ce livre: quelque chose que je regrette à présent... C'est d'avoir gâché le grandiose problème grec en le mêlant aux choses modernes! De m'être bercé d'espérance là où il n'y avait rien à espérer, là où tout ne m'indiquait que trop clairement une fin. D'avoir commencé, en raison dela dernière musique allemande, à fabuler sur "l'âme allemande"
6. A quarante trois ans (1888) extrait d'"Ecce Homo" sur" la naissance de la tragédie"
"On a négligé ce que l'ouvrage contenait de précieux. "Hellénisme et pessimisme" aurait été un titre moins ambigu: à savoir comme première explication de la manière dont les grecs sont venus à bout du pessimisme, par quels moyens ils l'ont surmonté... Cet ouvrage exprime un immense espoir Tout est prophétique dans cet ouvrage."
7. Et pour finir , retour aux vingt ans: "Nos humeurs ne cessent de s'approfondir. Aucune d'entre elles ne ressemblent exactement aux autres. Chacune est d'une insondable jeunesse, elle est ce qui fait naître l'instant! "

Propos recueillis par Annie ROUZOUL

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