Lovecraft peu connu des lecteurs de Direlire n'a pas enthousiasmé ceux qui l'ont lu. C'est un auteur que l'on apprécie en général lorsqu'on a entre 15 et 25 ans, mais que l'on oublie ensuite, comme cela est arrivé à Michel Houellebecq qui, pourtant, lui a consacré un livre bien plus tard Cet ouvrage a d'ailleurs donné lieu à autant de commentaires que Lovecraft lui-même.
"La couleur tombée du ciel", un excellent titre, est l'une de ses meilleures nouvelles bien qu'elle ne soit pas très représentative de l'ensemble de son oeuvre.
Certains ont essayé d'imaginer quelle pouvait être cette couleur et une comparaison intéressante a été faite avec le paysage d'Hiroshima et Nagasaki suite aux bombardements nucléaires qu'elles ont subis.
L'accent a été mis sur les références sensorielles très fréquentes, les odeurs, les sons, les couleurs qui contribuent à accroitre l'épouvante du lecteur, ou au moins essaient de le faire car nos lecteurs n'ont pas vraiment été épouvantés. Il est vrai que l'odeur du varech qui est insupportable pour Lovecraft, peut être appréciée par d'autres.
Le racisme exacerbé de Lovecraft a bien sûr été évoqué, ainsi que son puritanisme revendiqué.
Enfin les références aux diverses mythologies celtes et grecques ont été mises en évidence. Par contre Dieu est complètement absent. Les rêves sont des portes vers l'innommable et non vers l'inconscient freudien. c'est un mode de connaissance, d'exploration de mondes cachés.
Antoine Viquesnel
Lovecraft par lui-même
Je suis ce que je prétends être, un écrivain fantastique. Tout enfant déjà, je fus captivé par ce pouvoir occulte de l'inconnu, de l'irréel. Depuis toujours, craintes indicibles, rêves absurdes, chimères étranges et semi - intuitives qui hantent nos esprits ont exercé sur ma personne un charme puissant et inexplicable.
En littérature, j'ai accompagné Poe le long des chemins de la nuit et je me suis faufilé avec Machen aux Enfers. Baudelaire m'a conduit au domaine des astres horrifiques et je me suis repu de la démence interne de la terre en compagnie des contes ancestraux.
Mon maigre talent pour le croquis et le dessin me poussa à visualiser grossièrement les hôtes insolites de mes rêveries. Cette même tendance triste qui me poussait à dessiner provoqua en moi un grand intérêt pour les royaumes obscurs de la composition musicale ; ma préférence allait aux accords passionnés de la Planets Suite et aux autres oeuvres de la même veine. Ma vie intérieure devint alors une fête étrange aux horreurs surnaturelles et torturantes.
Quant à mes activités extérieures, elles étaient plutôt monotones. Au fil du temps, je sombrai de plus en plus dans une vie mesquine de reclus, une existence tranquille et philosophique au sein d'un monde peuplé de livres et de rêves. Mais l'homme doit subsister. Le corps et l'esprit peu aptes au travail manuel, j'éprouvais quelque embarras dans le choix d'une vocation appropriée. L'état de dépression dans lequel je me trouvais amena les choses à un point presque intolérable, et, pendant toute une période, je frôlai la catastrophe financière.
C'est alors que je décidai d'écrire.
Howard Phillips Lovecraft, Le visiteur venu des étoiles.
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