"L'assassin qui est en moi"de Jim Thompson

Séance du 18 février 2019 « L’assassin qui est en moi » de Jim Thompson

Présenté par JP Bartoli



Bonjour à toutes et à tous,

Notre session d’aujourd’hui est consacrée à ce genre de la littérature policière que l’on appelle le roman noir et plus particulièrement au roman noir américain, qui lui a très largement donné, sinon ses lettres de noblesse, du moins ses lettres de noirceur. Je veux dire ici que je suis très redevable à Jean Courdouan de m’avoir indiqué l’an dernier l’ouvrage de Benoit Tadié FRONT CRIMINEL qui est une histoire raisonnée du polar américain de 1919 à maintenant, qui m’a beaucoup aidé dans mes recherches.

Dans son acception la plus large le roman policier raconte une histoire centrée autour d’un crime de sang, et à ses débuts, au 19ème siècle le type de roman policier le plus exploité à été le roman à énigme, ce que les anglais, qui en ont été longtemps les maîtres, appellent un whodunnit (qui l’a fait ?) avec des auteurs prolifiques comme Conan Doyle et Agatha Christie, et qui fait toujours recette avec les reines du crime comme Elizabeth George, Mary Higgins Clark, PD James etc… En francophonie on a fait aussi très bien avec Maurice Leblanc, Gaston Leroux, puis Simenon et Boileau Narcejac et plus récemment Léo Malet, Fred Vargas.

Ces romans suivent en général un schéma très stéréotypé : un cadavre est découvert, la mort parait suspecte, un enquêteur, souvent un policier mais parfois un détective privé, ou bien un amateur éclairé comme Miss Marple, (mais travaillant en bonne intelligence avec la police officielle) essaient de démasquer le coupable ; une savante combinaison de découverte d’indices matériels ou insubstantiels (empreintes, mensonges maladroits, conversations surprises…) et du développement d’un raisonnement logique qui s’en est nourri (les petites cellules grises de Poirot, le travail méthodique de Maigret) permet de découvrir la vérité.

Que le lecteur se laisse porter par le récit ou qu’il essaye d’émuler l’enquêteur pour découvrir avant lui ou en même temps « qui l’a fait », il est toujours satisfait de voir que le crime ne paie pas et que le coupable sera dûment et souvent durement puni. Tout cela est très manichéen, il y a les bons et les méchants et les bons gagnent toujours ou presque : il y a eu « Un échec de Maigret », mais aucun d’Hercule Poirot je pense.

Ce sont les écrivains américains qui dans les années 1920-1930 vont faire exploser cet univers douillet, consensuel et hypocrite dans son traitement BCBG de situations par essence dramatiques, en y apportant un réalisme cru qui correspondait plus à ce que les lecteurs voyaient se passer autour d’eux ou pouvaient vivre eux-mêmes, dans le contexte dur de cette époque.

Cette nouvelle génération d’auteurs a su et a pu exploiter la source d’inspiration alimentée par les bouleversements provenant des deux traumatismes qu’ont connu les USA entre les deux guerres, en utilisant le langage qui convenait, et en bénéficiant d’une structure éditoriale favorable.

Le premier traumatisme c’est en 1919 l’instauration de la Prohibition (interdiction totale de la fabrication et de la distribution d’alcool) : véritable ‘pavé de l’ours’ elle a aggravé les maux qu’elle souhaitait combattre :

-Le banditisme organisé s’est développé et devenu un monopole au fonctionnement de plus en plus violent vu les enjeux financiers.

La corruption durable des polices et des institutions politiques locales par les gangs.

Les études de l’époque montrent une forte augmentation de la consommation avec un effet morbide pervers dû à la mauvaise qualité de ces produits clandestins.

Devenue ingérable la Prohibition a été levée en 1933 mais le mal était fait, d’autant plus que les Etats-Unis après une période de croissance d’après-guerre (assez instable d’ailleurs et marquée par de durs conflits sociaux) étaient entrés en 1929 dans la Grande Dépression qui s’est combinée à l’exode rural des fermiers ruinés du Mid-West pour mettre des millions de personnes miséreuses sur les routes.

Ces évènements n’ont pu qu’influer et inspirer l’œuvre d’écrivains les ayant vécus ou approchés de près et pour beaucoup comme Dashiell Hammett, Chandler, James Cain, Thompson qui ont connu une jeunesse mouvementée, en marge (mais à l’époque beaucoup de gens étaient en marge) ; Intelligents, ils s’étaient faits eux-mêmes, instruits certes mais plutôt autodidactes, ils parlaient et écrivaient le même langage simple, descriptif voire brutal que leurs lecteurs et qui évoluait vers ce qu’on appelle l’anglais américain, distinct de l’anglais châtié et introspectif des descendants des premiers colons anglo-saxons. Leur crédibilité et leur compréhension en était renforcée. Ils produisaient des récits qui sortaient de la routine du bien et du mal, qui décrivaient les situations d’un autre point de vue que celui des justiciers légalistes, parfois même celui des criminels comme ‘Petit César’ de WR Burnett (très vite adapté au cinéma, avec Edward G. Robinson) ; ceux de leur héros qui combattaient le crime (comme l’Op de Hammett et Philip Marlowe de Chandler) ne s’embarrassaient pas beaucoup de légalité et avaient la gâchette facile; c’est cette première étape dans l’évolution du roman policier qu’on a appelé « Hard Boiled », ce qui veut dire que ces détectives étaient des durs-à-cuire [et pas des œufs durs]. Beaucoup de ces récits étaient des nouvelles ou des romans sérialisés et publiés par les pulps magazines à très bon marché, qui ont été vraiment le support de la littérature populaire d’alors (aventures, western, science-fiction, policier) ; d’ailleurs comme la science-fiction (avec Astounding et John W Campbell) les histoires hard-boiled ont bénéficié de l’émergence d’un magazine leader « Black Mask » créé en 1921 et dirigé de 1926 à 1936 par Joseph ‘Cap’ Shaw qui a su attirer des auteurs comme Dashiell Hammett, Raymond Chandler, Carol Dally, Earl Stanley Gardner (qui n’a pas écrit que des ‘Perry Mason’) et les faisait souvent travailler en atelier

A partir du milieu des années ’30 une nouvelle branche vient pousser sur l’arbre de la littérature policière, à côté du genre Hard-Boiled, et qui deviendra le ‘Roman Noir’ au sens où on l’entend aujourd’hui c-à-d un récit criminel où il n’y a pas d’énigme à proprement parler, où l’enquête est périphérique et les personnages englués dans des situations dramatiques douloureuses qui vont en empirant et en font souvent des assassins, bien qu’ils soient eux-mêmes des victimes des conditions sociales ambiantes ; pour eux les dés sont pipés et d’ailleurs ce n’est pas une coïncidence si les premiers (Dashiell Hammett avec « La Moisson rouge », James M.Cain avec « Le facteur sonne toujours deux fois », Horace McCoy « On achève bien les chevaux », Steinbeck dans « Des souris et des hommes» ont été des auteurs marqués politiquement à gauche, comme Jim Thompson plus tard.

Bien que ces romans aient été des succès, reconnus pour leur qualité littéraire, le genre noir ne connaitra un plein essor qu’à partir de 1950, quand les pulps laisseront le rôle de vecteur principal aux livres de poche originaux (original paperbacks) publiant des textes inédits à bas prix faisant et leurs éditeurs qui n’avaient pas de royalties à payer aux éditeurs de livres brochés ou reliés ont fait la part belle aux romans policiers et particulièrement aux romans noirs. Par exemple James Cain a pu publier directement en 3 ans 3 textes refusés par les éditeurs traditionnels, et de nouveaux auteurs comme Charles Williams, Peter Rabe, Day Keene, David Goodis, Vin Packer, Jim Thompson, Chester Himes ont émergés. S’en est suivi un âge d’or assez court qui s’est matérialisé en France principalement dans la Série Noire de Gallimard, à côté des romans ‘Hard Boiled’.

Comme exemple du genre j’ai choisi « L’assassin qui est en moi » de Jim Thompson publié en 1952 (bien que j’ai aussi pensé à ‘La lune dans le Caniveau’ de David Goodis) parce que je crois que c’est du noir de noir, l’histoire de la descente aux enfers, racontée à la première personne, d’un policier meurtrier, intelligent et fou à lier.

Son auteur Jim Thompson est né en 1906 en Oklahoma dans le comté de Caddo, dont son père était shérif, mais la famille doit partir précipitamment pour le Texas suite à une défaite électorale cuisante du père et des soupçons de malversations. Une petite fortune gagnée dans la prospection pétrolière est vite dilapidée et Jim travaille comme garçon d’étage dans un grand hôtel de Fort Worth ; il est très mal payé mais comprend vite les combines et multiplie son salaire plusieurs fois ; ceci lui permet de financer à 20 ans une nouvelle tentative de prospection avec son père mais c’est encore un échec ; toutefois il écrit et est publié sporadiquement depuis l’âge de 14 ans et un directeur de magazine le fait admettre au Collège d’Agriculture du Nebraska ;il épouse Alberta Hesse mais doit quitter le Collège faute d’argent pour payer les cours; à partir de 1932 il commence à collaborer régulièrement à des pulps comme ‘True détective’ avec des articles sur des crimes réels, souvent illustrés de photos truquées et parfois écrits à la première personne ; ça paie plutôt bien (environ 3000 € actuels pour un texte de 5 à 6000 mots) et il en écrit beaucoup. En 1935 il adhère au Parti Communiste américain et participe à ‘l’Oklahoma Fédéral Writers Project’, un Fonds fédéral d’aide aux écrivains institué dans le cadre du New Deal de Franklin Roosevelt, et dont il devient vite le Directeur Général.

Il quitte le PC US en 1938, puis l’Oklahoma Project et va s’installer à San Diego en Californie; après avoir travaillé dans une usine d’aviation il commence à collaborer avec des quotidiens importants comme le ‘San Diego Journal’ et le ‘Los Angeles Mirror’ tout en écrivant ses premiers romans dont un inspiré de son expérience en usine ‘Ici et maintenant’ ; son premier roman noir « Nothing more than murder » en 1949 est traduit et publié dans la « Série Noire » de Marcel Duhamel sous le titre « Cent mètres de silence » avec le n° 54, donc un des tout premiers, entouré de noms comme Chandler, John Amila (auteur français d’ailleurs), James Hadley Chase, Dashiell Hammett.

En 1952 son agent lui procure un contrat avec ‘Lion Books’ un des plus actifs éditeurs de Poches originaux ; 15 jours après les premiers chapitres de « L’assassin qui est en moi » partent à l’éditeur ; dès lors il restera actif presque jusqu’à sa mort en avril 1977 avec plus de 20 nouveaux romans (dont « 1275 âmes » (Coup de torchon, de tavernier au cinéma), « M. Zéro », « Le lien conjugal », « Nuit de fureur ») , la co-écriture des scénarios de 2 films de Stanley Kubrik (« The Killing » et « Les sentiers de la gloire ») ; à noter que plus de la moitié de ses romans ont été publiés en France après 1983 chez ‘Rivages/Noir’ et non plus à la ‘Série Noire’, d’ailleurs en perte de vitesse à cette époque. Avant de mourir il aurait dit à Alberta, son épouse, de garder ses manuscrits parce que « … tu verras je vais devenir fameux 10 ans après ma mort » Il n’avait pas tort.



Venons-en donc à « L’assassin qui est en moi » que nous allons discuter dans sa version plus complète et retraduite publiée chez ‘Rivages/Noir’ en 2012.

Pour utiliser une platitude à la Lou Ford, c’est une œuvre à la fois simple et complexe :

Plutôt simple dans sa structure globale comme pourrait l’être une pièce de théâtre, car on peut distinguer quatre parties principales, dont chacune marque clairement une progression dans le drame et la tension qui le sous-tend, par l’occurrence à la fin d’une mort violente (un meurtre quoi).

Complexe dans l’écriture et le déroulement du récit parce que l’usage de la 1ère personne permet à Jim Thompson de ne pas respecter toujours l’ordre chronologique des évènements ou d’en faire un compte-rendu subjectif ; bien qu’il y ait des dialogues et des descriptions Lou Ford, le héros entre guillemets, dit ce qu’il veut, quand il veut et utilise abondamment la technique (théâtrale d’ailleurs) des apartés pour prévenir de ce qui va se passer ou pour justifier ses actions.

L’histoire se déroule presqu’exclusivement à Central City, une ville tout juste moyenne de 48 000 habitants qui bien qu’elle ait connu le boom pétrolier a conservé sociologiquement le fonctionnement d’une bourgade de province américaine : un shérif à l’ancienne, une entreprise dominatrice (d’origine locale), des notables qui s’épient, un machisme naturel, des noirs qui n’ont droit qu’à une mention d’une demi-ligne dans tout le livre (ce qui en dit long) et des vagabonds et des travailleurs du pétrole, qui animent les week-ends.

Il me parait important de situer les principaux personnages qui vont agir et interagir dans ce roman, et tout d’abord le narrateur,

Lou Ford, adjoint au shérif ; il a presque 30 ans, c’est un enfant du pays issu d’une vieille et respectable famille (père médecin) ; il est connu et apprécié de tout le monde: compétent, serviable, calme et poli, peut-être pas très intelligent et puis un peu rasoir, car il adore énoncer des lieux communs et des platitudes. Cet aspect rassurant cache peut-être une personnalité potentiellement explosive : très tôt orphelin, un frère adoptif, Mike Dean, qu’il adorait mais qui a fait plusieurs années de prison pour viol sur enfant, et qui est mort après sa sortie dans un accident aux circonstances suspectes.

Le shérif Bob Maples, âgé, fatigué considère Lou Ford comme son bras droit et lui fait toute confiance.

Joyce Lakeland : une jeune prostituée qui est arrivée récemment ; très belle, âpre au gain, elle envisage de faire un gros coup qui lui rapportera assez pour quitter la ville.

Joe Rothman : Chef du syndicat de la construction à Central City, un homme intelligent et rusé.

Elmer Conway : Fils à papa, cible du projet de Joyce.

Chester Conway : père d’Elmer, l’homme le plus puissant de la ville et le patron d’une très grosse entreprise ; c’est en tombant d’un de ses immeubles en construction que Mike Dean s’est tué.

Le traîne-lattes : apparait peu souvent mais de façon significative.

Hendricks : le procureur du comté, dirige aussi les enquêtes policières.

Amy Stanford : amie d’enfance et voisine de Lou Ford ; ils ont une liaison secrète qui est un secret de polichinelle pour toute la ville. Ref Lucille

Johnnie Pappas : C’est le fils du restaurateur où Lou Ford a ses habitudes ; c’est un adolescent un peu turbulent que Lou Ford aime bien et à qui il a évité des ennuis. Johnnie a toute confiance en lui.

Jeff Plummer : un autre adjoint du Shérif

Sauf le shérif Maples et Johnnie Pappas les principaux personnages ont un point commun : ce sont tous des manipulateurs :

Joyce Lakeland va essayer de manipuler Lou Ford pour l’entrainer ans son gros coup et s’enfuir avec lui.

Amy Stanton veut se faire épouser par Lou Ford

Chester Conway veut manipuler Ford pour qu’il tire Elmer des griffes de Joyce.

Joe Rothman essaie de monter Lou Ford contre Chester Conway

Quant à Lou Ford, qui n’aime pas être manipulé, il manipule à peu près tout le monde, individuellement ou collectivement, comme il le fait depuis toujours.



Première partie (chapitre 1 à 6), se termine par la mort de Joyce Lakeland et Elmer Conway

Alors qu’il prend un café près de la gare Lou Ford remarque un ‘traine-lattes’ qui l’observe de l’extérieur. Quand il s’apprête à partit le patron du restaurant refuse d’être payé pour le remercier d’avoir gentiment recadré son fils, Lou proteste que ce n’est rien, mais le patron insiste dans ses éloges; puis il s’apprête à vaquer à d’autres tâches, mais du coup Lou Ford ne l’entend plus de cette oreille « Je cale l’un de mes coudes sur le comptoir, je croise une jambe derrière l’autre…Je l’aime bien ce bonhomme… mais il est trop beau pour que le laisse filer. Poli, intelligent : les types comme lui je m’en délecte. J’embraye… » et il l’abreuve de lieux communs, « L’enfant est le père de l’homme », « j’y regarde à deux fois avant de mettre un pied devant l’autre » etc…

La confidence qu’il nous fait en même temps en a parte nous alarme tout de suite : « cette manière-là d’assommer les gens, elle est presqu’aussi jouissive que l’autre--la vraie--les assommer au sens propre. Celle que j’avais tenté d’oublier au prix de tant d’efforts, au point que j’y étais presque parvenu--jusqu’au moment où j’avais rencontré cette fille. » et en sortant il voit le traine-latte qui l’attend. page

Le début du 2ème chapitre est un flash-back sur la rencontre trois mois plus tôt de Lou avec ‘cette fille’ Joyce Lakeland ; c’est une prostituée assez discrète que le shérif lui a demandé d’aller contrôler et d’expulser s’il le croit nécessaire ; il y va, disposé à être poli comme tout gentleman du Sud-Ouest des EU qui se respecte car « Ici on dit ‘oui madame’ ou ‘non madame’ à tout ce qui porte une jupe ; et qui est de race blanche bien sûr. Ici vous êtes un homme, ou vous n’êtes rien » [et si vous n’êtes rien je vous souhaite bien du plaisir].

Mais la rencontre commence très mal, Joyce l’insulte, le traite de flicard et le frappe au point de le faire tomber ; quand il se relève il la bat comme plâtre à coups de ceinturon ; apparemment elle aime cela et commence entre eux une relation sado-masochiste durable et intense, qui réveille la violence rentrée qui couvait en lui depuis des années, ainsi qu’une soif de vengeance refoulée vis-à-vis de Chester Conway, le patron de Conway Construction.

Et c’est Joyce pour son malheur qui lui donne le moyen d’exercer sa vengeance ; elle veut quitter Central City avec un gros paquet d’argent extorqué à Elmer Conway avec la complicité de Lou Ford et en sa compagnie, car : « je ne renoncerai jamais à toi, jamais, jamais ». « Je l’embrasse, un long baiser, Joyce ne le sait pas mais elle est déjà morte », et ils commencent à échafauder leur plan ; et c’est la fin du Flash-Back et on revient à la fin du 1er chapitre, Lou sort du restaurant après avoir rasé le propriétaire et le traine-latte vient lui demander l’aumône ; Lou fait semblant d’acquiescer, de sortir de l’argent de sa poche et lui plante dans la paume de ma main le bout du cigare embrasé

Juste après l’incident du cigare Lou Ford se rend aux bureaux du syndicat de la Construction où l’a invité Joe Rothman, son Président ; celui-ci commence à la surprise de Lou par demander quels sont ses sentiments à l’égard de son frère adoptif, Mike Dean : « Je n’aurais pu l’aimer plus s’il avait été mon frère de sang » « même après ce qu’il avait fait ? » demande Joe car Mike a été condamné prison pour le viol d’une petite fille. Lou répond « Papa et moi étions sûrs que ce n’était pas lui le coupable » et en aparté « parce que le coupable c’était moi, Mike s’était laisser accuser à ma place ». Rothman en vient alors au sujet qui l’intéresse vraiment, càd monter Lou contre Chester Conway, qu’il accuse d’avoir tué Mike en le faisant pousser dans le vide ; Lou minimise la responsabilité de Conway, lui dit que tout ce qu’il raconte il le sait déjà, que le meurtre n’est pas certain et que d’ailleurs si le Syndicat et Joe lui-même avaient bien fait leur travail la chute de Mike aurait été stoppée par des planchers provisoires. Il essaie donc de faire croire à Rothman qu’il n’a aucune rancune contre les Conway, pour éviter de futurs soupçons, mais Rothman n’est pas complètement dupe et lui dit en le raccompagnant : « Les bobards que vous venez de me servir, Lou, gardez les pour les gogos ».

Lou rentre chez lui, dans la vieille maison de famille qu’il n’a pu se résoudre à vendre. Il se gare dans les anciennes écuries, le terrain de jeux de Mike et et lui enfants et où « Mike m’avait surpris avec la petite f… » Puis il entre dans la maison et y musarde notamment dans les bibliothèques qui abritent entre autres «d’épais volumes de psychologie morbide… Jung, Freud, Kraepelin [un nom à retenir]… toutes les réponses se trouvent là, sur ces pages…» puis il évoque les relations avec son père, qui quand il a compris la gravité de la ‘maladie’ de Lou a renoncé aux ambitions qu’il avait pour lui et se résout à le laisser vivre comme un rustre médiocre, càd « le policier typique des Etats de l’Ouest, c’est moi …je joue un rôle depuis si longtemps que je n’ai même pas besoin de me forcer ».

C’est alors qu’Amy Stanton qui l’attendait en haut l’interpelle. Bien entendu elle lui reproche de la négliger, elle pleurniche, se calme, ils font l’amour et elle lui demande de l’épouser ; il lui demande pourquoi, qu’est- ce qu’ils feraient de plus, et puis il veut devenir quelqu’un ; alors elle se moque de lui et lui dit que de toute façon il sera bien obligé de l’épouser. Lou, jamais à court de mensonges lui raconte que son père lui a fait une vasectomie, donc …elle ne peut être enceinte et elle lui a menti. Ils se séparent fâchés. Plutôt que samedi qui est une journée chargée pour Lou ils décident de se voir dimanche et auront une longue et franche discussion ; en tout cas c’est ce que veut Amy.

Le samedi est toujours agité à Central City (jour de paie, ouvriers du pétrole) et Lou Ford le passe à patrouiller, puis à calmer un ouvrier mexicain qui en a tué un autre. Il est en cellule, très agité et violent mais Lou appelé à la rescousse arrive à le calmer :« je n’ai jamais frappé un détenu, quelqu’un que j’aurais pu brutaliser en toute impunité »; d’ailleurs il n’aura bientôt plus envie de faire du mal à quiconque car il sera débarrassé de Joyce, qu’il rend responsable de sa rechute dans la ‘maladie’. Rentré chez lui il dîne puis, après avoir pris la décision de ne jamais épouser Amy, s’en va dormir du sommeil du juste.

Dès le lendemain matin, dimanche donc, Chester Conway vient voir Lou et là commencent indirectement à se révéler les manipulations de Lou pour se débarrasser de Joyce et se venger des Conway :

Faire croire à Chester (inquiet de la liaison entre Elmer et Joyce) que Joyce va partir si on lui donne 10 000 $

Faire croire à Elmer que Joyce va partir avec lui et les 10 000 $

Continuer à faire croire à Joyce qu’elle va partir avec 10 000 $ et que lui, Lou, la rejoindra 2 semaines plus tard

Alors que ce qu’il a prévu est de faire croire au reste du monde que Joyce et Elmer se sont entretués après la remise des 10 000 $

Chester croit donc que Lou va remettre lui-même l’argent à Joyce le soir même, mais Lou refuse en expliquant que Joyce veut que ce soit Elmer qui lui apporte l’argent ; Chester accepte de mauvaise grâce.

Plus tard Elmer arrive avec les 10 000 $, mais il hésite à aller au bout du projet (c’est à dire partir avec Joyce) mais se laisse convaincre que c’est pour le mieux. Lou en profite pour lui extorquer 500 $.

Lui parti, Lou va faire une sieste en se disant ceci : « Joyce et Elmer vont mourir. Joyce l’a bien mérité. Les Conway l’ont bien mérité. Je ne suis pas plus impitoyable que cette fille qui n’hésiterait pas à causer ma perte pour obtenir ce qu’elle veut ; Je ne suis pas plus impitoyable que ce type qui a fait précipiter Mike dans le vide. »

A huit heures du soir il se réveille et prend sa voiture pour se rendre chez Joyce, sur Derrick Road, un peu à l’écart de la ville.

Avant d’arriver chez Joyce, il se gare dans le chemin d’une ferme abandonnée et crève son pneu arrière droit ; puis il se rend à pied chez Joyce qui l’accueille chaleureusement et ils font l’amour ; quand elle sort de son bain il lui explique qu’il va la tuer (et pourquoi), et il le fait, à coup de poings, avec une violence que je ne décrirai pas, puis va chercher le pistolet que Joyce gardait dans sa coiffeuse.

Peu après Elmer arrive et entre dans la chambre où il découvre le corps sanglant et désarticulé de Joyce ; épouvanté il demande ce qui s’est passé et Lou, riant comme un dément, lui dit qu’elle est suicidée et vide sur lui le chargeur du pistolet.

Retournant à sa voiture, il change le pneu, repart vers Central City et manque d’emboutir la voiture de Chester qui inquiet vient voir pourquoi Elmer n’est pas encore rentré à la maison ; Lou essaie de dissuader Chester d’aller jusque chez Joyce, mais il insiste et découvre le carnage et quand Lou le rejoint chez Joyce il est en train de téléphoner pour qu’une ambulance vienne chercher Joyce, pas tout à fait morte semble-t-il : « Pas question de la laisser mourir. Pas comme ça. Je veillerai à ce qu’elle finisse sur la chaise électrique ».



La partie 2 (chapitres 7à 12) se termine par la mort de Johnnie Pappas

Plus tard dans la nuit de dimanche Lou sort du palais de justice, irrité par les questions auxquelles il a dû répondre et vexé que son plan se soit mal déroulé. Il s’arrête prendre un café au restaurant du Grec, puis va voir son fils Johnnie Pappas, le jeune prédélinquant auquel il s’intéresse à la station-service où il travaille ; ils discutent un peu, puis Lou lui faire le plein d’essence et le paie avec un billet de 20 $.

De retour chez lui il retrouve Amy furieuse de son retard et pour arrêter ses jérémiades lui raconte les évènements de la nuit ; leurs tentatives amoureuses tournent mal et en outre Amy s’aperçoit que quelqu’un est passé avant elle; elle se doute de qui il s’agit et se met très en colère contre Lou. Ceci l’alarme profondément car il craint qu’elle additionne 2 et 2 et devine qui est l’assassin ; poussé dans ses retranchements il lui propose de l’épouser, ce qui la radoucit aussitôt.

Puis toujours en pleine nuit le shérif et procureur Hendricks viennent le chercher pour continuer à l’interroger ; Hendricks se révèle plus affuté que Lou le croyait. Il lui demande de prouver son alibi (le rendez-vous avec Amy), mais le Shérif lui dit de ne pas insister car l’honneur d’une jeune fille respectable est en jeu ; malgré les mensonges grossiers de Lou, Maples le soutient encore quand il essaie d’expliquer que ce n’est pas son pneu qui a laissé une trace dans le chemin herbeux avant la maison de Joyce ; tous les trois affamés, ils décident d’aller prendre un petit déjeuner chez le Grec ; Hendricks, qui a téléphoné peu avant à Conway leur apprend que celui-ci a affrété un avion pour transporter Joyce à l’hôpital de Fort-Worth, où elle sera mieux soignée, et Bob Maples décide que lui et Lou Ford l’y accompagneront.

Après l’atterrissage à Fort Worth, Conway envoie Bob Maples avec l’ambulance à l’hôpital et lui-même accompagne Lou à l’hôtel, où il le laisse se ronger les sangs. Quand Bob revient de l’hopital il est manifestement grognon et préoccupé; il dit à Lou : « Je sais quel homme tu es, n’est-ce pas Lou ? » et celui-ci comprend qu’il y a un malaise mais n’arrive pas à savoir ce qui s’est passé à l’hôpital. Un peu plus tard Bob propose une virée entre hommes en ville mais Lou se rend compte qu’il est soûl et estime plus sûr de le ramener à Central City ; dans le train, toujours soûl, Bob lui donne un coup de poing et lui dit : « arrête avec tes dictons comme ‘ce qui est fait est fait’, je vais te dire une chose à laquelle tu n’as pas pensé : c’est juste avant la nuit qu’il fait le plus noir » « vous vous trompez Bob » dit Lou « Non, non c’est toi qui te trompe » répond Bob.

A peine de retour, mardi matin, Lou reçoit chez lui Rothman qui manifestement le soupçonne d’avoir tué Joyce et Elmer pour se venger des Conway mais Lou nie tout et Rothman le croit (ou fait semblant) car il lui dit : « vous n’êtes pas taillé pour le rôle », et Lou lui croit qu’il l’a convaincu ; ce qui lui donne quand même à réfléchir c’est que, comme Bob, Rothman vient de relever son usage des clichés ; mais il conclut « si je me mets tout à coup à parler autrement que vont penser les gens ». Là-dessus Amy l’appelle et ils conviennent de se voir le soir même. Après s’être reposé il appelle chez le shérif mais sa femme ne veut pas qu’il vienne le voir car Bob est trop malade. Il décide alors d’aller au Palais de justice parler avec le procureur, car il sent que les soupçons à son égard augmentent et il essaie de lancer l’enquête sur de fausses pistes, il ressort à Hendricks un certain nombre d’hypothèses boiteuses ou invraisemblables qu’il avait exposées à Rothman mais Hendricks ne mord pas à l’hameçon. On voit bien que Lou commence à tourner en rond, en ville et surtout dans sa tête.

De retour chez lui, il vaque dans la bibliothèque et en prenant un ancien volume relié il fait tomber une vieille photo, qu’avec du mal il reconnait comme une photo obscène de sa gouvernante, aux cuisses ouvertes et striées de coups ; un épisode refoulé lui revient en mémoire : son père, fou de rage, après avoir battu Lou, renvoyant Hélène, pour avoir débauché son fils adolescent en lui faisant croire que les femmes aiment être battues. Lou dit « J’avais oublié cette scène et à présent je l’oublie à nouveau. Il y a des choses qu’il faut oublier si on veut continuer à vivre» et il brûle la photo.

A ce moment Hendricks l’appelle pour lui dire que le coupable est arrêté, c’est Johnnie Pappas, on a des preuves mais Johnnie refuse d’avouer ; Lou pourrait-il venir aider à convaincre, il a de bons rapports avec lui. Lou se met en route, après avoir prévenu Amy qu’il serait en retard et en chemin il est soudain pris d’un doute : dimanche dans la nuit il a payé l’essence à Johnnie avec un des billets de 20 $ extorqués à Elmer. Dès qu’il arrive à la prison Hendricks l’accueille et lui dit que la preuve contre Johnnie est un billet de 20 $ provenant du chantage de Joyce et dont les numéros avaient été relevés. Lou essaie sans succès de donner d’autres explications à cette terrible découverte.

Lou est donc introduit dans la cellule de Johnnie. Après qu’il se soit assuré que Johnnie n’a dit à personne d’où provenait ce billet ils discutent plutôt amicalement et Lou donne à Johnnie une leçon de vie à sa façon: il y a des puissants et des pauvres, et eux sont tous les deux du mauvais côté du manche comme on dit, et lui confie que c’est lui l’assassin; Johnnie d’abord croit que Lou veut qu’il s’accuse à sa place, mais Lou le détrompe et Johnnie résigné comprend ce qui va lui arriver. Lou lui dit « ça me fait du mal Johnnie, encore plus mal qu’à toi », le frappe à la gorge, lui enlève sa ceinture, et on imagine la suite. Lou ressort de la cellule, referme la porte et va rendre compte à Hendricks : si on laisse Johnnie tranquille 2 ou 3 heures il est probable qu’il avouera ; que Hendricks le tienne au courant.





3ème Partie (chapitre 13 à 19) se termine par la mort d’Amy

Lou retourne chez lui retrouver Amy et ils font l’amour ; il est un peu brutal, mais elle en redemande, à la façon peut-on penser de Joyce et Hélène (la gouvernante).

Lou reçoit 3 appels pendant qu’il est avec Amy : un de Hendricks pour le remercier d’avoir résolu l’affaire : « il a avoué ? » demande Lou « mieux que ça Lou, il s’est pendu » répond Hendricks ; le 2ème de Conway, aussi pour le féliciter ; le 3ème plus sombre de Bob Maples, bouleversé, qui lui demande de venir le voir, mais Lou refuse, comprenant que le shérif le soupçonne toujours.

Bien entendu il est obligé de raconter sa version de ce qui s’est passé à Amy qui le félicite d’avoir résolu l’affaire et espère qu’il aura une prime ; et elle excite sciemment sa colère et son sadisme et comme dit Lou pudiquement « Amy en a eu pour son argent ».

Le lendemain épuisé par toutes ces tribulations il tombe opportunément malade, ce qui lui évite de se montrer en ville ou de recevoir trop de visites pendant quelques jours. Cependant celle que lui rend Bob le secoue sérieusement, car il lui demande si il a jamais pensé à quitter Central City, car il aurait pu faire une belle carrière ailleurs et il n’obtient aucune réponse sincère (peut-être Amy n’aurait pas voulu partir… ?) Lou lui demande s’il essaie de se débarrasser de lui « C’est ce qu’on pourrait croire hein ? » dit Bob et Lou lui redemande ce que Conway à dit à Bob à Fort-Worth, qui lui répond que ça n’a pas d’importance et s’en va.

Toujours aussi peu lucide Lou pense que tout s’arrange plutôt bien, mais Amy continue de le préoccuper ; même si elle se fait discrète et ne parle plus de mariage elle reste une menace pour lui, elle est trop intelligente pour ne pas comprendre ce qui c’ est passé, il faut donc la tuer : « il faut que ça se passe et le plus tôt possible » mais sans risque.

Amy et Lou trouvent bizarre que Conway ne soit pas venu remercier Lou et il décide de sortir de sa tanière ; tout d’abord il va affronter Hendricks, qui est un blessé de guerre avec un éclat d’obus dans le corps et quand Lou lui demande ironiquement où il est situé Hendricks répond : « dans le cul, je l’ai dans le cul »

Puis il va enfin voir le père de Johnnie pour lui faire ses condoléances mais l’accueil est très réservé ; le restaurant est en cours de rénovation complète « ça lui aurait bien plus à Johnnie » lui dit Pappas, qui demande aussi si quelqu’un était entré dans la cellule de Johnnie après lui ; Lou écarte les soupçons qui pourraient peser sur d’autres « non, je les connais bien, personne n’aurait fait ça » répond-il avec son aplomb habituel.

Puis il se rend en voiture sur Derrick Road où habitait Joyce et s’arrête contempler le paysage, mais il ne voit rien, ne pense plus clairement, tout dérape.

Une voiture s’arrête derrière lui et Joe Rothman vient s’asseoir à côté de lui ; la conversation qui s’en suit est totalement menée par Rothman qui lui demande si Pappas se résigne au suicide de son fils ; non répond Lou « il se demande si quelqu’un est rentré dans sa cellule après moi, et je lui ai répondu qu’aucun de mes collègues ne l’aurait fait »

« Ce qui règle le problème » répond Rothman qui pour bien enfoncer le clou apprend à Lou que :

Les travaux de réaménagement sont exécutés et financés par Conway

Que Johnnie est enterré en terre consacrée, ce qui veut dire que l’Eglise et la communauté ne croient pas au suicide de Johnnie

Que Johnnie a un alibi pour l’heure du meurtre car la voiture d’un ouvrier du syndicat a eu ses 4 pneus volés le dimanche à 21h30, dont 2 ont été vendus à un autre ouvrier et les 2 autres retrouvés à la station-service sur la voiture de Johnnie. (vérifier)

Donc Rothman conclut Lou va devoir déguerpir au plus vite et pour l’y aider il promet de lui fournir les services d’un ténor du barreau ; Lou comprend que Joe fait cela pour se protéger lui-même et Joe lui donne 15 jours pour partir.

A partir de là Lou ne sait plus réfléchir rationnellement, il sait seulement qu’il lui faut tuer Amy, même s’il a du mal à se souvenir pourquoi ; et il attend une occasion pour échafauder un plan.

L’occasion se présente quand le traine-latte qu’il a maltraité réapparait et vient le voir pour le faire chanter. Il lui explique qu’il l’a suivi le jour du meurtre et l’a vu entrer dans la maison de Joyce ; bien qu’absent sur un chantier pendant plusieurs jours il a apprit ce qui s’est passé entre temps, et la mort de Johnnie ; donc il veut de l’argent ; Lou n’est plus en état de nier et il accepte de lui donner 5000 $, qu’il va devoir emprunter et ils se donnent rendez-vous dans 15 jours à 9h du soir.

Lou et Amy se retrouvent le soir, très amoureux ; ils décident de se marier, Amy est aux anges et Lou la manipule pour qu’ils fuguent tous deux dans 15 jours.

Le lendemain matin un certain Dr Smith vient voir Lou pour lui demander si la clientèle de son père est à vendre ; Lou comprend vite qu’il s’agit d’un psychiatre envoyé par EUX, le ridiculise sur des questions médicales qu’il connait mieux que lui, et le met grossièrement à la porte en lui disant d’aller faire son rapport à ceux qui l’envoient.

Le chapitre 18 commence ainsi :

« J’ai tué Amy le 5 avril 1952 peu avant 9h », mais avant d’en venir au meurtre nous allons avoir droit à plusieurs flash-backs, comme si Lou hésitait à décrire ce moment abominable. Amy et lui ont passé 15 jours heureux, il s’est montré très attentionné pour elle ; il a aussi été travailler tous les jours mais placardisé, on ne lui confie plus que des missions mineures, et jamais en solo.

Un jour d’ailleurs il surprend une conversation entre le shérif et l’adjoint Plummer, qui en a assez d’espionner Lou et jette son étoile à la tête de Bob Maples.

Tous les jours il passe voir le Grec, et il arrive même à mettre le grappin sur Conway pour le remercier lui; il veut montrer qu’il existe, qu’il n’a peur de personne, il veut sauver la face le plus longtemps possible.

Dans l’après-midi du 25, il va voir Bob Maples pour lui dire qu’Amy et lui vont se marier et faire un petit voyage de noces ; Bob un peu surpris le félicite et lui dit de ne se soucier de rien.

Puis il revient chez lui, se repose un peu et prépare la scène par laquelle il va essayer de faire croire que le traine-latte a tué Amy au cours d’un cambriolage.

Quand Amy arrive à l’heure elle proteste parce qu’il ne l’aide pas avec ses valises, il n’est pas prêt, et il reste planté là ; elle comprend que quelque chose ne va pas et comme elle s’approche de lui il lui dit de se taire et il la frappe de toutes ses forces ; elle tombe, il déchire ses vêtements ; elle n’est pas encore morte et rampe vers lui, s’agrippe, il se dégage brutalement ; comme pour Johnnie il souffre pour elle et en même temps reste complètement cynique.

Quand enfin le traine-lattes arrive Lou achève Amy à coups de pied dans la tête et va à sa rencontre et lui mets en main un épais rouleau de dollars ; ils entrent dans la cuisine et l’homme se met à hurler en voyant le cadavre d’Amy ; Lou devient fou de rage, ce salopard a tué Amy, il prend un couteau de cuisine et le poursuit, mais glisse sur les fluides d’Amy ; l’homme sort de la maison en hurlant, Lou le poursuit de loin en criant : A l’assassin, à l’assassin il a tué Amy Stanton ; un attroupement se produit et l’adjoint Plummer qui passait en voiture prend son fusil, fait une sommation, puis vide son fusil sur l’homme ; Lou lui tombe dessus, le bourre de coups ; il raconte son l’histoire à sa façon, mais « pas besoin de peaufiner…Tout le monde semble comprendre ce qui s’est passé », on lui fait une piqure calmante et on le ramène chez lui.

4ème et dernière partie : la fin de Lou

Quand Lou se réveille il est seul dans sa chambre ; pas d’infirmière, pas d’amis ou de collègues, personne pour le consoler ou le soigner. Mais il entend du bruit à l’extérieur, où l’adjoint Plummer est assis sur une marche ; il lui propose d’entrer mais l’autre le dos tourné remarque qu’ici dehors, l’air est pur et parfumé « enfin jusqu’à maintenant » ; puis Plummer, toujours sans le regarder, lui apprend que le shérif s’est suicidé la veille au soir ; Lou referme la porte et rationnalise que Bob, comme les autres, avait tiré des conclusions hâtives sur les assassinats.

Vers 11h arrive Hendricks, qui entre avec Plummer ; il l’accuse de tous ces meurtres mais Lou démolit tous ses arguments avec son aisance habituelle jusqu’à ce qu’Hendricks sorte de sa poche une longue lettre trouvé dans le sac d’Amy ; c’est une lettre d’amour très touchante où Amy fait comprendre à Lou qu’elle sait ce qui s’est passé mais qu’elle le soutiendra et l’aidera, s’il le veut et s’il lui fait un peu confiance, même si elle doit l’attendre des années. Elle lui aurait remis cette lettre avant qu’ils ne prennent l’autocar pour quitter la ville et bien sûr elle n’a pas eu l’occasion de le faire.

Lou est effondré : que dire quand tu te noies dans ta propre M… et qu’on t’empêche d’en sortir à coup de pied…Hé bien il va se battre et il lance la lettre avec mépris à Hendricks en disant «elle était sacrément bavarde » et Plummer se fait entendre « Moi je l’aimais bien Mlle Amy ». Lou continue dans son déni jusqu’à que Hendricks décide de l’emmener au poste et il faut que Plummer le mette en joue pour qu’ils les suivent.

Le lendemain on le met dans la cellule qu’occupait Johnnie Pappas, ce qu’il trouve outrageant, et tout à coup il entend la voix de Johnnie qui dit : « Salut à tous ! je passe des moments formidables ici et je regrette que vous ne soyez pas là. A bientôt ! » et le message se répète indéfiniment plusieurs heures par jour, pendant plusieurs jours. Mais ça ne l’empêche pas de réfléchir, plutôt rationnellement pour changer; et il se produit en lui un vrai changement ; la brume se lève, il réalise qu’il y a vraiment une preuve de sa culpabilité, même si elle n’est pas encore utilisée ; maintenant qu’il admet que preuve il y a il commence à accepter sa culpabilité « je peux regarder la vérité en face ».

Alors il retrace lucidement son parcours criminel : il a commencé avec la gouvernante et la punition de son père dit-il « m’a mis sur les épaules un fardeau de crainte et de honte dont je ne pourrais jamais me débarrasser » ; pour lui Hélène était la femme et elle partie il ne pouvait se venger sur elle ; même s’il avait fini par comprendre qu’il y avait les femmes et la femme il voulait toujours se venger sur toute « femelle » ayant commis les mêmes actes et Joyce d’abord puis Amy ont répondu à de critère.

Et les choses deviennent de plus en plus claires :« je savais-tout en refusant de l’accepter-que je n’étais pas sain d’esprit », puis « je n’ai pas cessé de repousser Amy non parce que je ne l’aimais pas, mais parce que je l’aimais » ; et il reconnait que Amy ne l’aurait jamais trahi, ni même Joyce.

Tout ce drame vient de ce qui s’est passé avec la bonne, cela est la cause externe, mais c’est lui Lou qui ne pouvait résister à ses pulsions. On a vu qu’il avait beaucoup lu d’ouvrages de psychiatrie et entre autres un traité de Kraepelin il peut même nommer sa maladie : dementia praecox, la schizophrénie paranoïde, …incurable.

Après huit jours en prison il est transféré à l’asile d’aliénés, un peu plus confortable mais la torture psychologique recommence avec la projection en diapositives de photos d’Amy ; il essaie de faire croire qu’il en souffre, et en même temps il a aimé les regarder et quand il suggère qu’il pourrait manier le projecteur lui-même, les projections cessent.

Au bout de 6 jours Lou entend la voix tonitruante de Billy Boy Walker, l’avocat que lui avait promis Joe Rothman, qui arrive dans sa chambre en accusant tout le personnel des pires sévices sur sa personne ; « Qu’avez-vous fait de ce pauvre homme ? Lui avez-vous arraché la langue, fait rôtir son pauvre corps etc etc… ».

Bref il lui fait quitter l’asile dans sa voiture, pour le ramener chez lui, et lui dit que ce sont les autorités qui ont délivré le mandat de libération, mais que « IlS ne le lâcheront plus, ils ne peuvent plus faire machine arrière » « J’ai compris dit Lou » qui sait qu’il est en danger de mort. Billy Boy lui propose de quitter la ville avec lui mais Lou refuse.

Vous savez que la version de la Série Noire est beaucoup plus courte (50 pages environ) que celle-ci ; le texte à été coupé ou adapté pour des raisons éditoriales, mais je ne suis pas sûr que ce soit la seule raison: la longue lettre d’amour d’Amy n’existe pas dans la 1ère traduction, ni la description par Kraepelin de l’origine et des signes de la démence précoce, ni le chapitre 25 de notre édition ; il est très court mais très important parce que Jim Thompson fait parler Lou à la 2ème personne (tu) et non plus à la 1ère : je, je ,je… ce qui pourrait dire qu’il est un peu sorti des ténèbres. J’en cite 2 passages :« Le temps qui te reste est dérisoire, mais il te semble avoir l’éternité devant toi » et il précise « tu as l’éternité, mais elle fait un kilomètre de large et 3 cm de profondeur, et elle grouille d’alligators »

Puis il piège sa maison (de l’alcool, des bougies) pour partir en beauté ; il sait (ce que nous avons compris depuis longtemps) que Joyce est toujours vivante et qu’ILS vont la ramener chez lui à Central City).

Et quand il voit la maison cernée par des hommes armés il s’assure une dernière fois que tout est en place et cache un couteau dans sa manche. Hendricks, Conway, Plummer entrent dans la maison avec…Joyce Lakeland, plâtrée jusqu’au cou, couverte de bandages ; elle avance vers lui « …Lou ce n’est pas moi qui… » « Bien sûr ma belle » et il lui saute dessus, lui enfonce le couteau dans la poitrine et le monde explose. Une dernière pensée lui vient : « je pense que c’est tout… sauf si les gens comme nous ont droit à une seconde chance dans l’au-delà. Nous, nous tous qui avons commencé la partie avec une mauvaise donne… qui voulions si bien faire et avons tant déçu…Moi et Joyce, Johnnie, Bob, Elmer, Amy. Nous tous »







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