Compte-rendu de la séance animée par Paulette QUEYROY
Walser a écrit trois romans tous autobiographiques., trois romans en trois ans, chacun écrit en un mois seulement: "Les enfants Tanner", "Le commis" et "L'Institut Benjamenta". Ils sont écrits sans ratures, d'un seul jet et publié sans relecture.
"Les enfants Tanner" est structuré en 18 chapitres dont 10 de 10 pages, sans plan, tous les chapitres sont parfaitement interchangeables. Aucun nom de lieu, aucune date et nombreux personnages sans nom. Par contre le livre est rythmé par la succession des saisons.
Walser s'inscrit dans le courant littéraire qu'on a appelé la littérature du refus avec Bartleby et Melville.
La redécouverte de Walser aujourd'hui peut s'expliquer par le goût de notre époque pour des personnages soucieux de liberté, de vie sans contraintes, se sentant bien dans le monde mais sans se laisser prendre.
Antoine VIQUESNEL
BILLET A CLAUDINE par Michel BOUDIN
Les enfants TANNER, un rêve flaubertien?
Connais-tu WALSER, jolie cousine?
Moi non plus.
Et pourtant, depuis la dernière séance de DIRELIRE, il me semble que je ne connais que lui et qu'il est un peu l'auteur que j'attendais.
Car vois-tu, curieuse Claudine, à travers la chaleureuse présentation qui a été faite des "enfants TANNER", il m'a semblé voir se dessiner en pointillé le rêve un peu fou de Flaubert: écrire un roman sur rien! Quelque chose qui se tient debout tout seul, une cathédrale de mots.
Or, j'ai cru comprendre que ce WALSER était justement capable d'écrire un récit qui ne raconte rien et qui donne seulement à lire!
Jolie prouesse...
En poésie je ne vois que Rimbaud (qui fut souvent cité) pour réussir un coup pareil. "Il a élevé, nous dit Todorov, au statut de littérature, des textes qui ne parlent de rien."
La manière faite matière, en somme.
Plonge-toi donc au plus vite, Claudine, dans ces "enfants TANNER" et n'oublie pas de faire part de tes émerveillemnts à ton cousin.
FLORENTIN
de Monique SICARD, L'enfant, le poète et la neige
Je ne connaissais pas Robert WALSER. Alors que je lisais "Les enfants Tanner" cet été, que j'écoutais récemment certaines interventions à la séance de DIRELIRE, ces paroles chantaient dans ma mémoire:
Regardez les oiseaux du ciel, ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n'amassent rien dans les greniers...Regardez les lis des champs, comme ils croissent: ils ne travaillent ni ne filent et pourtant Salomon dans sa splendeur n'a jamais été vêtu comme eux...ne vous inquiétez pas du lendemain, le lendemain s'inquiétera pour lui-même."
Walser n'avait pas d'église et pas d'autre religion que la "joie du moment". Mais la personne de Jésus l'a fasciné depuis l'enfance. Et l'un de ses premiers poèmes s'intitule "Jésus dans la neige".
Et voici ma lecture des "enfants Tanner" , une lecture parmi d'autres...
- Au commencement était la neige. Elle tombait du ciel et le monde était beau. Et puuis il y avait l'homme, un homme noir. Avec la neige il se lava et devint tout blanc. Et quand l'homme fut malade, un petit flocon de neige offert par un petit enfant lui rendit la santé. Mais l'enfant, livré à la solitude, trop petit pour sentir et comprendre, finit par geler dans la nuit et le froid. Et dans l'indifférence de Dieu.
Il y avaity un poète, il s'appelait Sébastian, il était comme un enfant insouciant, il chantait la beauté du monde, et aux hommes il faisait don de ses chansons. Mais" il n'était pas de taille à affronter les froides exigences de la vie". Et par une nuit d'hiver, il mourut dans la neige. "Comme il a noblement choisi sa tombe! Là, sous ces magnifiques sapins verts et la neige qui les recouvre".
-Et puis il y a Simon Tanner, le double romanesque de Robert Walser - un poète lui aussi, un enfant libre et insouciant, amoureux de la nature. IL traverse la vie avec grâce. A la fin du roman, une voix tentatrice l'invite à sortir "dans la nuit d'hiver".
- Et cinquante ans après, en 1956, Robert Walser rencontre la mort, une nuit d'hiver, un soir de Noël, dans la neige.
Monique SICARD
WALSER a inspiré un poème à Danielle GREGOIRE. Le voici
Tu l'as rejointe enfinDans ses bras blancs glacés,Celle que tu aimaisD'un amour insenséELLEReine des NeigesMère de cruauté.Petit Poucet charmeurSemant tes feuillets blancs,Promeneur solitaireAspirant l'air du monde,Tu avais renoncéA la marche obstinéeQui t'a poussé longtempsSur les routes des hommes.Avec acharnementTu as frappé aux portes,Servi avec orgueilSans t'asservir jamaisAux lois de la Cité.Mais ton oeil clair et durPerçait les apparences,Et ils t'ont reconnu,Les poètes, tes frères,Et toujours défendu.Danielle GREGOIRE
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire